S'organiser et planifier
De la prise de compétence « gestion des eaux pluviales urbaines » à la mise en œuvre de projets d’aménagement, vous trouverez ici quelques conseils pour vous organiser et planifier la gestion durable des eaux pluviales sur votre territoire.
Prendre la compétence et établir une gouvernance
Du fait de la répartition législative des différentes compétences liées à l’eau et à l’aménagement de l’espace public, le nombre d’acteurs impliqués dans une gestion durable des eaux pluviales est conséquent. En effet, la compétence « gestion des eaux pluviales urbaines » doit être organisée en cohérence avec les compétences assainissement collectif ou à la Gemapi, et donc souvent à différentes échelles territoriales. Cette organisation des compétences n’est pas imposée nationalement mais il est indispensable qu’elle soit clarifiée localement dans « la politique pluviale du territoire ». Car ce territoire est unique, et il revient aux différents acteurs institutionnels, quelle que soit la répartition des compétences, d’établir un diagnostic partagé sur l’ensemble des sujets liés à l’Eau.
Organiser la transversalité
Une gestion durable des eaux pluviales nécessite une articulation d’abord « entre les compétences de l’eau » mais aussi entre les différentes compétences de la ou des collectivité(s) : urbanisme, voiries, espaces verts, assainissement, GEMAPI, établissements d’enseignement...
Cette articulation se fait en fonction des priorités locales et en prenant en compte l’ensemble des pluies possibles : des plus faibles et fréquentes, aux plus fortes et rares.
Seule la collaboration entre tous les acteurs, usant chacun de ses compétences et leviers peut permettre de répondre aux enjeux majeurs de la gestion des eaux pluviales et de profiter pleinement de leur potentiel.
De ce fait, il est nécessaire d’organiser la transversalité entre les différents services d’ une même collectivité mais aussi entre collectivités d’un même bassin afin d’intégrer une culture commune de l’eau dans l’aménagement. L’agent en charge du pluvial est de plus en plus un « animateur », « coordonnateur », ou un « chef d’orchestre » de la gestion des eaux pluviales.
C’est l’une des missions de l’animateur de la politique « eaux pluviales » au sein de la collectivité ! N’hésitez pas à créer ce poste dans votre collectivité !
L’animateur de la politique « eaux pluviales » est le garant d’une bonne coordination entre l'ensemble des acteurs concernés, tant dans la stratégie générale qu’à l'échelle des projets.
Un réseau dynamique d’animateurs eaux pluviales existe à l’échelle nationale, n’hésitez pas à le rejoindre pour partager vos questionnements et retours d’expérience.
Les métiers et rôles évoluent
Les agents en charge de la gestion durable des eaux pluviales n’ont plus pour rôle de dimensionner des réseaux et bassins, ils deviennent de plus en plus « animateurs de la politique pluviale » : de l’élaboration du diagnostic et de la stratégie, à la gestion patrimoniale, en passant par la déclinaison politique et réglementaire locale.
Le rôle du Service Public de Gestion des Eaux Pluviales Urbaines (SP-GEPU) est donc d’assurer la concertation nécessaire et de fédérer les acteurs pertinents en mettant en évidence, pour chacun, ses bénéfices et responsabilités. Il doit accompagner et réussir à changer le paradigme du recours systématique aux réseaux enterrés et le transformer en un paradigme de valorisation de l’eau de pluie.
Impliquer tous les acteurs de l’aménagement
Au-delà de la collectivité, il est important d’impliquer tous les acteurs de l’aménagement (aménageurs, lotisseurs, maîtres d’œuvre, entreprises…) et le plus en amont possible afin de prendre en compte la gestion des eaux pluviales dès le montage de l’opération.
Pour réussir la gestion durable et intégrée des eaux pluviales, c’est une nouvelle « philosophie » qu’il faut mettre en place, celle qui applique quelques principes de base se rapprochant du cycle naturel de l’eau. C’est-à-dire ne pas imperméabiliser, ne pas concentrer, ne pas laisser ruisseler, et pratiquer la multifonctionnalité des espaces : un espace végétalisé devient un jardin de pluie, une noue ; une voirie ou un parking deviennent des structures réservoirs, etc… Cela implique donc de prendre en compte cette conception dès le démarrage de tout projet urbain.
Définir des niveaux de service
Il n’est pas possible de gérer toutes les pluies de la même manière. Ainsi, les « niveaux de service » sont une notion essentielle qui permettent de mieux identifier et de répartir les missions et responsabilités liées à la gestion des eaux pluviales.
Délimiter un périmètre d’intervention
Gérer uniquement les eaux pluviales des aires urbaines n’est pas toujours suffisant :
- La pluie tombée à l’amont peut ruisseler ruisseler jusqu’à la ville et la traverser ;
- Les précipitations urbaines s’écoulent vers l’aval, urbanisé ou non.
Il est donc important de prendre en compte les interactions avec les territoires voisins de sa zone d’intervention et peut être opportun d’élargir son périmètre d’intervention aux zones rurales et naturelles. Pour en savoir plus : Pour une politique territoriale de gestion des écoulements pluviaux et de ruissellement (FNCCR,2023)
En territoire péri-urbain, rural, agricole voire forêts, nombre des principes présentés précédemment restent les mêmes. Il s’agit de gérer à la source les eaux pluviales, d’éviter leur ruissellement voire de restaurer les cycles naturels de l’eau.
A cet égard, en milieu agricole, la pollution des eaux pluviales est essentiellement liée à deux phénomènes : l’érosion des sols et l’entraînement de matières minérales par les ruissellements et à l’utilisation de fertilisants et de produits phytopharmaceutiques qui, lessivés par les eaux pluviales, sont transférés dans les eaux superficielles et souterraines. Cette problématique est du ressort d’autres politiques (programme d’actions régional nitrates, Ecophyto, plans d’action des aires d’alimentation des captages, etc.) et doit mener à d’autres changements de pratiques, même si une gestion durable des eaux pluviales permet de limiter ces transferts de pollution (éviter ou limiter le drainage notamment).
Dans ces territoires, ce sont les pluies les plus importantes qui révèlent les principaux enjeux, soit d’inondation, soit de mouvement de terrain et d’érosion des sols.
Intégrer la politique pluviale dans les documents d’urbanisme et de planification
Afin d’encadrer les nouveaux projets d’aménagement ainsi que toutes les opérations de renouvellement et d’amélioration de l’existant, il est important d’intégrer des orientations et prescriptions dans les documents de planification et d’urbanisme en sus du schéma directeur et du règlement d’assainissement pluvial.
Le parcours guidé du site TURBEau, conçu par l’agence de l’eau Seine-Normandie, vise à aider les collectivités à rédiger leurs documents d’urbanisme afin de mieux prendre en compte les enjeux liés à l’eau sur leur territoire.
Il recommandé d’établir un zonage pluvial et de l’intégrer au règlement du PLU, PLUi pour être rendu visible et qu’il s’impose aux autorisations d’urbanisme.
Dans le Zonage pluvial
Le zonage pluvial est l’outil technique et juridique qui permet de favoriser l’infiltration à la parcelle et de réduire les conséquences des eaux de ruissellement. Il est l’outil d’aide à la décision qui permet aux collectivités de formaliser leurs politiques de gestion des eaux pluviales et des eaux de ruissellement. Il est intégrable dans les documents d’urbanisme, notamment le plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi), et peut être rendu opposable.
Les métropoles, communautés urbaines et communautés d'agglomération ont la charge d'élaborer un zonage pluvial sur leur territoire. Pour les communes membres d’une communauté de communes, cette élaboration reste à leur charge, mais peut être transférée à la structure intercommunale.
Vous souhaitez établir un zonage zonage ? N'hésitez pas à consulter les documents ci-dessous : ils vous apporteront toutes les connaissances nécessaires à l’élaboration de votre zonage pluvial. Ils s’appuient sur des expériences concrètes afin de vous aider à déployer cet outil sur l’ensemble de votre territoire qu’il soit urbain ou rural.
Dans le SCoT
Des mesures pour inciter à la désimperméabilisation ou à la gestion durable des eaux pluviales peuvent figurer dans les documents du SCoT (Projet d’aménagement et de développement durables (PADD), Document d'orientation et d'objectifs (DOO)). Quelques exemples de mesures sont présentés ci-dessous.
Imposer d’organiser la gestion des eaux pluviales à la parcelle sur tout le territoire
« Les documents d’urbanisme imposeront, sauf en cas d’impossibilités techniques liées à la nature des sols, l’infiltration des eaux pluviales sur la parcelle ou parcelle dédiée. La gestion des eaux pluviales sur les nouveaux espaces urbanisés devra ainsi s’effectuer sur le terrain d’assiette. » (SCoT du Pays de Neubourg, DOO, 3.3.1, 2020)
Fixer un délai cible pour la réalisation de zonages pluviaux et leur intégration au PLU/PLUi
« Les collectivités locales du territoire disposent, dans les délais prévus par la réglementation, d’un zonage et d’un schéma d’assainissement des eaux pluviales en cohérence avec les zonages et schémas directeurs d’assainissement des eaux usées. » (SCoT de Saint Brieuc, IX.I Protéger la ressource en eau, 5 C, projet de SCOT arrêté le 16 février 2024)
« Les collectivités disposent, dans un délai de 5 ans, d’un zonage et d’un schéma d’assainissement des eaux pluviales en adéquation avec les zonages et schémas directeurs d’assainissement des eaux usées » (SCoT de Saint Brieuc, 2015)
Dans le PLU(i)
Des mesures pour inciter à la désimperméabilisation ou à la gestion durable des eaux pluviales peuvent figurer dans les documents du PLU (Projet d’aménagement et de développement durable (PADD), Orientations d’Aménagement et de Programmation (OAP) sectorielle ou thématique, Règlement). Quelques exemples de mesures sont présentés ci-dessous.
Il est possible par exemple de fixer différents coefficients pour limiter l'imperméabilisation des sols à l'échelle des projets : coefficient de pleine terre, coefficient d’imperméabilisation, coefficient de biotope….
Imposer un coefficient de pleine terre
« Les espaces de pleine terre représenteront au minimum 30 % de la surface de la parcelle. » (PLU de Troyes, 2023-Règlement, Article 13 UCB)
« 30 % au moins de la superficie du terrain doit être réservée à des aménagements paysagers réalisés en pleine terre. » (PLU de Strasbourg, 2021-Règlement, Article 13 UCB)
Rendre inconstructibles les fonds de terrains (jardins)
« En zone UA (centre-ancien), UC (zone périphérique du centre ancien) et UD (zone d’habitat intermédiaire) « Aucune construction ou installation n’est autorisée dans les cœurs d’îlots repérés aux plans de zonage par le figuré ΔΔΔΔ ΔΔΔΔ, exceptée la construction d'un abri de jardin d’une superficie maximale de 6 m² et dans la limite d’un abri par unité foncière. ». PLU d’Epernay Agglo Champagne, Règlement, III, UA1 1, 2019
Intégrer la gestion des eaux pluviales dans des documents locaux
La gestion durable des eaux pluviales peut faire l’objet de règles dans d’autres documents que ceux d’urbanisme ou de planification : par exemple, dans le règlement d’assainissement, le règlement du service GEPU ou le règlement de voirie.
Le règlement d’assainissement permet de réglementer le raccordement des eaux pluviales aux réseaux d’assainissement et en particulier au réseau unitaire. Il peut définir notamment les cas de dérogations d’un rejet au réseau unitaire et les modalités de raccordement.
Le règlement de voirie peut contenir des éléments relatifs à la gestion des eaux pluviales ; en tant que document d'urbanisme, il est opposable.
Nous attirons votre attention sur le fait que le règlement du service pluvial n'est pas opposable. En effet, un règlement est opposable dans la mesure où il est réalisé par un Service Public à caractère Industriel et Commercial. Or, le service public de gestion des eaux pluviales (définit par le décret n° 2015-1039 du 20 août 2015) est un Service Public Administratif.