Lever les freins
Les solutions de gestion durable des eaux pluviales …
Idée reçue n°1 : « C’est pour les grandes villes et les nouveaux projets »
La désimperméabilisation des espaces publics est un des moyens de favoriser l’infiltration des eaux pluviales. Des opérations de grande ampleur étant souvent montrées à titre d’exemple pour les villes « éponges », la désimperméabilisation peut apparaître comme une solution très peu accessible pour beaucoup de collectivités. Cependant, il existe des solutions simples et peu coûteuses qui peuvent être mises en œuvre à toutes les échelles, y compris dans le cadre de petites opérations courantes lors de travaux de rénovation ou d'entretien de la voirie.
A l’échelle de la collectivité, l’occasion peut être saisie à chaque aménagement pour intégrer la gestion des eaux de pluie à la source, en priorisant des solutions fondées sur la nature : moins de bitume dans les cours d’écoles, pieds d’arbres végétalisés, désimperméabilisation des allées des cimetières, jardins de pluie sur des espaces collectifs…
Cette exemplarité dans l’espace public est un levier important pour impulser des actions à l’échelle privée. Dans les milieux construits, bâtis, qu’ils soient urbains ou ruraux, chacun à l’échelle de sa parcelle en favorisant l’infiltration naturelle, peut œuvrer de manière complémentaire aux solutions mises en place par la collectivité (Source : France Nature Environnement).
Idée reçue n°2 : « Ça aggrave les inondations ! »
L’objectif des solutions de gestion durable des eaux pluviales n’est pas de se substituer au réseau d’assainissement existant mais de le soulager. Il ne s’agit pas d’aggraver les inondations mais bien au contraire d’en réduire l’importance, la fréquence et les conséquences lors des différents types d’épisodes pluvieux.
Certains réseaux ne sont même pas dimensionnés pour les pluies courantes, soit parce qu’ils ne l’ont jamais été, soit en raison de l’extension urbaine. Sur ces réseaux, il est impossible d’augmenter le débit des tuyaux d’où le recours aux solutions à la source pour augmenter la capacité d’infiltration et réduire la saturation.
Pour les épisodes pluvieux plus intenses et occasionnels, voire les épisodes exceptionnels (qui sont néanmoins de plus en plus fréquents avec le changement climatique), les aménagements alternatifs, par leur rôle de stockage tampon, réduisent ou atténuent les inondations. A ces occasions, ces ouvrages sont remplis d’eau, ce qui peut impressionner mais est normal : cela épargne les personnes et les biens. Par ces aménagements, on contribue notamment à protéger des inondations en aval (Source : France Nature Environnement).
Idée reçue n°3 : « Ça coûte cher ! »
Lorsqu’il est question de mettre en œuvre des solutions de gestion des eaux pluviales à la source, le frein financier est souvent évoqué. Pourtant de nombreux retours d’expériences démontrent qu’au contraire, en raisonnant sur le coût global (investissement + gestion + bénéfices du projet), une gestion intégrée bien conçue coûte moins cher à la collectivité que des solutions classiques tout tuyau et génère même des économies indirectes.
Ces solutions (noues, tranchées d’infiltration, chaussées réservoirs, revêtements poreux, etc.) permettent de réduire les coûts d’investissement, d’exploitation et de maintenance des infrastructures de collecte et de transport souterrain voire de bassins d’orage : plus besoin de bordures, de caniveaux, de linéaires de tuyaux et de raccordements et de bassins d’orage aux dimensions pharaoniques (Source : France Nature Environnement).
Idée reçue n°4 : « Ça demande beaucoup d'entretien ! »
La diversité des ouvrages de gestion des eaux pluviales in situ, leur caractère multi-usages et surtout les nouvelles façons de faire peuvent inquiéter quant à l’entretien de ces espaces. Sans occulter le risque réel de mauvais entretien, les retours terrain sont toutefois rassurants.
Pour les opérations de maintenance ou de réparation, ces ouvrages ont l’avantage d’être plus accessibles que les réseaux enterrés. Des noues, tranchées ou puits d’infiltration peuvent fonctionner de manière satisfaisante plusieurs dizaines d’années sans aucun besoin de curage ou de décolmatage. L’utilisation de techniques végétalisées améliore encore cette autonomie en s’appuyant sur les services gratuits rendus par un sol fonctionnel et les racines des plantes.
Dès leur conception technique, les ouvrages doivent garantir un fonctionnement optimal. Par exemple, privilégier une alimentation diffuse plutôt qu’une seule arrivée d’eau dans une noue peut retarder les obstructions. (Source : France Nature Environnement)
Il est nécessaire de réfléchir à qui assurera l’entretien et l’exploitation des espaces dès les phases de conception (ce qui nécessite souvent d’identifier leur fonction principale). La solution la plus efficace consiste à faire en sorte que ce soit les usages autres que la gestion des eaux pluviales qui justifient l’entretien (Source Graie).
Idée reçue n°5 : « Ça pollue les sols et les nappes phréatiques ! »
Avant d’arriver au sol, l’eau de pluie contient des polluants atmosphériques mais dans des concentrations très faibles et dans la plupart des situations, elle est de qualité potable. Arrivée au sol, l’eau peut s’infiltrer dans le sol si elle tombe sur une zone poreuse ou ruisseler si elle arrive sur une surface imperméable. L’eau de pluie qui pénètre dans le sol là où elle tombe est ensuite filtrée par les couches successives du sol, s’il est sain et en bonne santé. Les micro-organismes du sol ont également une action de dépollution. A l’opposé, l’eau qui ruisselle se charge en divers polluants tout au long de son parcours. Plus la distance parcourue par l’écoulement est importante, plus l’eau de ruissellement se concentre en polluants.
La gestion durable des eaux pluviales apporte des solutions pour éviter de concentrer les flux d’eau et de polluants. L’eau de pluie récupérée dans les ouvrages dédiés est peu polluée. Elle retrouve ainsi un statut de ressource (Source : France Nature Environnement).
Les études menées par le GRAIE montrent que le risque de pollution chronique des sols et des nappes souterraines par l’infiltration directe des eaux de ruissellement est quasiment nul, à la condition d’infiltrer les eaux au plus près de leur point d’arrivée au sol.
Idée reçue n°6 : « Ça menace la stabilité des bâtiments ! »
Les problèmes d’instabilité ou d’enfoncement des bâtiments sont parfois avancés lorsqu’il est annoncé que l’on va laisser l’eau s’infiltrer et potentiellement saturer les sols voisins. La problématique des sols gonflants est aussi dans les têtes avec des images de maisons effondrées suite à l’alternance du gonflement-retrait des argiles.
Zones instables, sols singuliers très peu perméables ou encore nappe phréatique très proche de la surface restent des cas particuliers, qui ne doivent pas occulter que l’infiltration des eaux pluviales est possible la majorité du temps, à condition de respecter des règles de bon sens. Test d’infiltration, analyse du sol, de la topographie, des écoulements et dimensionnement de l’ouvrage en fonction des volumes à infiltrer, réalisés par des bureaux d’études spécialisés, permettent de limiter grandement les risques de déstabilisation des fondations du bâti, ainsi que les problèmes d’humidité dans les sous-sols des bâtiments. Des retours d’expériences ont permis d’établir quelques règles simples. Par exemple, pour un ouvrage situé à moins de 3 mètres d’un bâtiment, il ne faut pas drainer dans cet ouvrage plus d’eau que la surface du bâtiment en question, ce qui correspond au volume des eaux de toiture de l’édifice (source : Graie).
Enfin, il est important de souligner que ce sont les tassements associés au dessèchement des sols qui sont en cause dans une majorité de dégâts aux immeubles. Les ouvrages d’infiltration, en permettant la ré-humidification des sols urbains, participent ainsi à lutter contre leur assèchement notamment lors des canicules de plus en plus longues et fréquentes (Source : France Nature Environnement).
Idée reçue n°7 : « C’est dangereux pour les riverains ! »
L’eau visible, en permanence ou transitoirement, dans certains aménagements comme les bassins et les noues, peut effrayer les habitants quant au risque de noyade. On compte en France 1 000 décès par noyade par an (d’après Santé Publique France – juin 2021) mais aucun ne concerne les ouvrages de gestion des eaux pluviales in situ. Si ce risque est réel, il faut néanmoins avoir en tête qu’un bassin végétalisé, ne présente pas plus de danger qu’une fontaine sur une place publique (Source : France Nature Environnement).
Dans la majorité des ouvrages, les hauteurs d’eau sont faibles et la présence de l’eau est temporaire, ce qui limite les risques. De plus, de nombreux écoquartiers se développent autour de l’eau apparente qui devient un élément du paysage et participe au bien-être des riverains.
Idée reçue n°8 : « Ça attire les moustiques ! »
Comme les solutions de gestion durable des eaux pluviales préconisent une gestion des eaux de pluie en surface, elles sont souvent suspectées de favoriser le développement des populations de moustiques.
Les noues, tranchées d'infiltration, toitures végétalisées et bassins de rétention - infiltration sont dimensionnés de manière à permettre une évacuation rapide de l'eau, typiquement dans un délai de 24 à 48 heures maximum pour les pluies courantes ; pour les pluies exceptionnelles la vidange du bassin peut être plus longue. Ce laps de temps est insuffisant pour permettre le développement complet des larves de moustiques, qui nécessitent entre 4 et 12 jours.
Quant aux mares et bassins à ciel ouvert qui conservent de l'eau en permanence, ils ne sont pas nécessairement des foyers à risque pour les moustiques. En effet, lorsque ces écosystèmes sont de bonne qualité, ils abritent souvent des prédateurs naturels (libellules, batraciens...) qui contribuent à réguler les populations de moustiques en se nourrissant de leurs larves (Source : Graie).
Idée reçue n°9 : « Ça ne fonctionne pas sur les sols peu perméables ! »
Lorsque les terrains sont peu perméables, il faut rechercher le maximum de surface. Il n’y a jamais d’argile affleurante mais toujours une partie pédologique au-dessus plus perméable. Un sol pédologique bien vivant a une perméabilité à 10-3 m/s et une porosité de 40%. Lorsqu’il pleut, notamment en forêt, il n’y a pas de formation de flaques en surface, même si les sols sont constitués de roches. Si avec une perméabilité de 10-7 m/s, on utilise 10 fois plus de surface qu’à 10-6 m/s alors on a le même résultat final. Pour réussir un aménagement et la gestion locale de l’eau, il faut utiliser le plus de surface possible et limiter la concentration de l’eau en un espace donné.
Une perméabilité à 10-7 m/s permet d’infiltrer 8,6 mm par jour (80% de la pluviométrie annuelle). (Source : Gestion durable et intégrée des eaux pluviales - Foire aux questions, ADOPTA, AERM)